Le parc national de l’Isalo, créé en 1962, deux ans après l’indépendance du pays, est le deuxième plus ancien parc national de Madagascar. Il couvre 815 km² (environ la moitié de la superficie du Grand Londres), s’étendant entre 500 et 1300 mètres d’altitude, dans la province de Fianarantsoa, au sud de l’île. Il est constitué d’une chaîne de montagnes en grès vieille de 250 millions d’années (cinq fois plus ancienne que l’Himalaya) sculptée par l’érosion en pics acérés et profonds canyons traversés de rivières permanentes. Il abrite une multitude de plantes et d’animaux, dont six espèces de lémuriens. Il fut la destination suivante de notre road trip à Madagascar après avoir quitté Ranomafana.
De Ranomafana à Isalo
En une démonstration saisissante de la diversité des paysages malgaches, en une à deux heures après notre départ, la forêt tropicale montagneuse laissa place à un plateau désertique plat. Seuls quelques affleurements rocheux et eucalyptus interrompaient la linéarité de l’horizon. Quelques aloès clairsemés rompaient la monotonie brune du sol. La monotonie fut suspendue par l’imposant rocher d’Ifandana, formation géologique rappelant l’Uluru australien. Au-delà, la terre devenait légèrement plus fertile, permettant la présence de maigres vergers de manguiers et de buissons nourrissant chèvres et petites communautés humaines. La route était globalement en bon état ; elle comportait peu de nids-de-poule comparée à la moyenne nationale. De plus, étant assez droite, nous avons rapidement parcouru les 350 km séparant Ranomafana de Ranohira, le village-portail du parc national de l’Isalo.
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Hébergement au village de Ranohira
Nous avons posé nos valises dans une maison d’hôtes appelée Leader Hotel. À 80 000 ariary, c’était un peu plus cher que ce que nous avions payé jusqu’ici, mais c’était l’un des hébergements les moins chers du village. Notre chambre était spacieuse, propre, avec un balcon donnant sur un joli jardin et, au loin, les montagnes de l’Isalo. Vous pouvez explorer d’autres options d’hébergement sur la carte ci-dessous.
Préparation de la visite du parc d’Isalo
Notre guide (obligatoire) pour la randonnée du lendemain, un homme jovial habillé en Indiana Jones, est venu chez nous pour discuter des détails de la sortie. Il se présenta sous le nom de Bienvenue. Je lui demandai s’il s’agissait de son véritable prénom ou d’un pseudonyme de guide. Son anglais était correct mais il ne comprit pas ma question. En tout cas, il fut effectivement un compagnon accueillant, compétent et serviable durant toute la marche. Voici son Facebook si vous souhaitez le contacter.
Parmi deux circuits possibles, nous avons opté pour le plus long, d’une durée de 6 heures pour un coût de 300 000 ariary : 70 000 pour le ticket d’entrée par personne, plus 140 000 pour le guide. Il proposait aussi des sandwichs pour 40 000 ariary par personne. J’ignore s’il comptait y mettre du caviar ou du foie gras, mais nous avons préféré de grosses baguettes, des œufs durs et du fromage fondu du coin pour une fraction du prix. Le rendez-vous du matin fixé, nous avons siroté un café sur le balcon avant d’aller nous balader et dîner au crépuscule.
Balade dans Ranohira
Ranohira était un village africain typique, composé d’une seule rue principale. Une église et le bureau de la guilde des guides étaient les seuls bâtiments notables. Malgré la popularité du parc national, le village n’était pas plus développé que la moyenne et, hormis les propriétaires de maisons d’hôtes, peu semblaient travailler dans le tourisme (vente de souvenirs, organisation de tours, cuisine occidentale, mendicité auprès des blancs, etc.). Simple et paisible, je trouvai l’endroit agréable, les gens vaquant à leurs affaires et nous abordant uniquement avec le sourire et une discrète curiosité.
Pour manger, nous avons choisi un restaurant parmi une offre limitée d’établissements quasiment identiques. Le menu se limitait au plat du jour : riz, haricots et porc. Par porc, on entendait surtout du gras, de la peau et des os. J’en mangeai autant que possible sans être écœuré, et au grand bonheur de Sophie, je donnai le reste aux chiens affamés qui attendaient dehors.
Galerie photo de Ranohira
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Randonnée dans le parc national de l’Isalo
Nous sommes partis à 8h et, après un quart d’heure de route sablonneuse, nous étions au départ du sentier. Notre chauffeur partit nous attendre au point d’arrivée et nous entamâmes la montée raide le long de la roche. De rares manguiers et tapias poussaient dans la roche et le sable. Le tapia, endémique des Hautes Terres, est connu pour son bois résistant au feu et ses fruits acidulés que nous avons picorés toute la journée. Des touffes de catharanthus aux fleurs violettes, reconnues pour traiter la leucémie, égayaient le paysage. L’horizon s’élargissait à mesure que nous gagnions en altitude, avant de disparaître lorsque nous franchîmes un col pour déboucher sur un plateau aux allures d’amphithéâtre extraterrestre.
Au passage, nous avons aperçu la première de plusieurs grottes servant de sépultures temporaires aux morts du peuple Bara. Je dis « poser » et non « enterrer » car les cercueils en bois, finement ouvragés, reposaient à l’air libre. Après une période de deuil, les corps sont exhumés lors d’une fête annuelle et déposés dans des cavités plus hautes. Mis à part ces cercueils, seuls quelques vestiges humains subsistaient : 1) une minuscule hutte de pierre construite il y a des siècles par les Sakalava, les premiers habitants des lieux avant l’arrivée des Bara venus d’Afrique, et 2) des cairns érigés pierre après pierre pour faire des vœux, un peu comme les pièces jetées dans la fontaine de Trevi. Je doute que tous leurs souhaits se soient réalisés, mais ces amoncellements faisaient au moins le bonheur des lézards, postés au sommet pour surveiller les environs.
À part cela, seule la nature brute régnait : formations de grès insolites et bosquets isolés de tapias et d’astéropéias, toutes deux espèces endémiques de Madagascar. Des lichens tapissaient les rochers de motifs orange, jaunes, gris et noirs, leurs couleurs indiquant leur âge, du plus jeune au plus ancien. Des guêpiers voltigeaient d’arbre en arbre, accompagnant le chant incessant des cigales.
Notre premier arrêt fut au belvédère nommé Petit Nazareth. Situé au sommet d’un rocher proéminent, il offrait une vue panoramique permettant d’admirer pleinement l’unicité du paysage. En contrebas, un grand nombre d’aloès et d’autres plantes semblaient entretenus par les employés du parc, ce qui poussait Bienvenue à le surnommer « jardin botanique ».
Nous sommes ensuite descendus dans un ravin abritant un bassin naturel aux eaux limpides et une petite cascade. Les rives sablonneuses étaient ombragées par de hauts pandanus. Cet endroit était un véritable oasis. Nous nous y sommes arrêtés pour une baignade et un peu de repos. Une falaise bordait le bassin, mais l’eau étant trop peu profonde, nous avons renoncé au plongeon. Nous avons été rejoints par un père et sa fille allemands et un autre couple, accompagnés de leurs guides, seuls autres visiteurs rencontrés ce jour-là.
Nous avons ensuite traversé le plateau pendant deux bonnes heures avant de descendre un profond canyon vers le nord. En bas coulait une rivière bordée d’une végétation luxuriante que les locaux appellent à juste titre la « petite jungle ». S’y trouvait le campement de Namaza. Plusieurs locaux étaient présents : des agents du parc vérifiant les billets, un vendeur ambulant avec une glacière et d’autres personnes, probablement chargées de préparer les fameux sandwichs à 40 000 ariary. Deux tables bien décorées attendaient l’arrivée des groupes touristiques.
Comme nous avions nos propres sandwichs, nous avons laissé Bienvenue bavarder avec ses amis et sommes allés déjeuner au bord de la rivière. Attirés par les miettes tombées, deux petits oiseaux au ventre jaune se sont approchés. Sophie leur lança un gros morceau de pain qui, hélas, tomba trop près de nous. Ils tentèrent quelques incursions timides mais préféraient manifestement attendre notre départ pour venir festoyer tranquillement.
Nous avons terminé notre randonnée par la remontée du canyon. Cette portion, plus fréquentée par les randonneurs faisant des circuits courts, était jalonnée de groupes. Le sentier traversait d’abord une zone boisée où nous avons aperçu deux espèces de lémuriens (lémur brun à front roux et lémur catta) ainsi que deux caméléons camouflés dans les branches. Ensuite, il longeait la rivière, accompagnés par un martin-pêcheur qui semblait nous suivre. Une averse soudaine se mêla brièvement aux gouttes suintant des falaises moussues à l’approche de l’arrivée.
Nous avons terminé par un lieu paradisiaque : deux bassins entourés de hautes falaises, nommés la piscine bleue et la piscine noire, en référence à la couleur de leur eau. La piscine noire l’était car son fond restait invisible. Dommage que le temps manquait pour grimper et tenter un plongeon depuis les falaises. Nous nous sommes contentés d’une courte baignade avant de repartir.
Un peu après le campement, notre chauffeur nous attendait sur le parking. Nous sommes rentrés au village et avons passé la fin de journée à nous détendre avant de poursuivre le voyage vers Tuléar le lendemain matin.
Galerie photo du parc national de l’Isalo
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